Existe-t-il une école idéale ?
Reconversion en thérapie : soutien aux jeunes, éducation adaptée, méthodes Montessori, Freinet. Valorisation de la socialisation et de l'autonomie.
C’est pourquoi, depuis 2010, de diplômes en formations, je donne le meilleur de moi-même pour mettre au profit des autres mon expérience et mon savoir faire.
L’humilité et la remise en cause font partie de ma manière d’évoluer car un thérapeute avisé est avant tout un thérapeute qui accepte de s’auto-évaluer.
Au plaisir de vous rencontrer,
Claudia Maréchal
Cela m’a conduite à une reconversion professionnelle pour devenir thérapeute. Aujourd’hui j’ai la chance d’aider non seulement les adultes mais aussi les enfants et les adolescents dans leur histoire personnelle, leurs blessures, leur reconstruction et la maladie. Mais « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » et les leçons tirées de mon ancien métier me permettent d’entrevoir une nouvelle entrée en matière auprès des établissements scolaires au moyen d’ateliers permettant au personnel enseignant de porter un nouveau regard sur le monde de l’enfance et ses apprentissages. Cela représente pour moi une belle réussite.
Qu’est-ce que l’école ?
Dans la déclaration universelle des droits de l’enfant on peut lire « l’enfant, pour l’épanouissement harmonieux de sa personnalité, a besoin d’amour et de compréhension » tout comme « l’intérêt supérieur de l’enfant doit être le guide de ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de son orientation (…). L’enfant doit avoir toutes possibilités de se livrer à des jeux et à des activités récréatives, qui doivent être orientés par les fins visées par l’éducation ; la société et les pouvoirs publics doivent s’efforcer de favoriser la jouissance de ce droit ».
Pour développer sa personnalité, l’enfant se fie à ses référents en matière d’éducation. En premier lieu naturellement à ses parents. Ceux-ci éduquent leurs enfants en fonction de leurs représentations sociales, de leur perception de la fonction de l’enfance, de leurs idéaux concernant la vie sociale (valeurs, croyances…). À l’origine du développement, il y a donc les enfants et les parents. Mais au fur et à mesure que l’enfant grandit, il aura besoin de référents extérieurs pour comparer, réajuster, évaluer ce qui lui a été transmis. Il est nécessaire que ces référents soient extérieurs au cadre familial même au sens large de la famille car l’enfant va avoir besoin d’appréhender d’autres manières de percevoir les choses à travers des filtres sociaux différents et c’est en grande partie aux enseignants qu’incombe cette mission. Car on ne peut parler d’école sans parler en premier lieu de socialisation. Cette socialisation correspond au processus par lequel l’enfant intériorise les divers éléments de la culture environnante (valeurs, normes, codes symboliques et règles de conduite) et s’intègre dans la vie sociale. Le sociologue David Emile Durkheim dit que « l’avenir ne peut être évoqué du néant : nous ne pouvons le construire qu’avec les matériaux que nous a légués le passé » et « l’idéal pédagogique d’une époque exprime avant tout l’état de la société à l’époque concernée ».
Ceci signifie deux choses :
1) que l’enfant n’arrive pas à l’école vierge de tout apprentissage ou de toute socialisation. Il porte déjà le bagage acquis depuis sa naissance.
2) L’école dans son organisation et ses apprentissages doit s’adapter constamment aux changements sociaux pour répondre le mieux possible aux besoins de l’enfant vis-à-vis de la société dans laquelle il va grandir.
L’école doit donc être un lieu de socialisation et d’apprentissages adapté à chaque enfant en fonction du contexte social.
Mais qu’en est-il vraiment ?
Forces et faiblesses du système classique d’enseignement dans les écoles publiques.
De l’enseignement primaire à l’enseignement secondaire les rythmes, les apprentissages, les exigences et les attentes pédagogiques et sociales évoluent.
Si l’on s’attarde un instant sur le développement de l’enfant, on constate rapidement qu’on ne peut pas déroger au schéma suivant concernant l’assimilation des notions pédagogiques : le vécu par le corps puis la manipulation d’objet et ensuite la réalisation d’une tâche uniquement par le biais de l’intellect.
Jean Piaget distingue 4 principaux stades du développement de l’enfant :
1) Le stade sensori-moteur (de la naissance à environ 2 ans)
Il correspond au développement et à la coordination des capacités sensorielles et motrices du bébé.
A cet âge, l’intelligence du bébé est essentiellement pratique. Elle est liée à l’action : le bébé touche les objets, met à la bouche il apprend peu à peu à comprendre le fonctionnement de son corps et à faire la différence entre son corps et les objets.
2) Le stade pré-opératoire (de 2 à 7 ans)
A ce stade, les acquisitions de l’enfant au niveau de la fonction symbolique sont nombreuses, ne serait-ce que le développement du langage.
C’est également l’âge d’une plus grande intériorisation de l’action, l’enfant peut penser à ses gestes sans avoir besoin de les réaliser dans la réalité immédiatement.
3) Le Stade opératoire concret (7 – 12 ans)
A ce stade, l’enfant acquiert une mobilité croissante au niveau de ses structures mentales et de ses réflexions. Ses théories de l’esprit deviennent plus subtiles. Il peut désormais envisager d’autres points de vue que les siens. Il procède également à ce que Piaget nomme des « opérations mentales ». Par contre, les raisonnements ont encore besoin d’un support concret.
4) Le stade formel (12 – 16 ans)
Il s’agit pour Piaget, du dernier stade. A l’adolescence, le maniement des opérations mentales progresse de façon importante, notamment parce que l’enfant commence à raisonner sur de l’abstrait. Les adolescents ne sont donc plus obligés de passer par le concret. Ils peuvent réfléchir sur des notions en soi (le bien et le mal, l’infini, la mort…).
Dans la structure classique de l’enseignement, les enfants sont regroupés par année de naissance. Or comme on le voit dans les stades de développement proposés par Piaget, une stade peut durer plusieurs années. La maturation intellectuelle et l’acquisition des apprentissages ne résultent donc pas d’une progression linéaire et identique pour tous.
Tout d’abord il faut noter que plus l’enfant est jeune plus la différence d’évolution sur une même année est grande. Ainsi un enfant né en janvier d’une année aura une maturité et une capacité d’apprentissage différente d’un enfant né en décembre de cette même année. Même si aujourd’hui l’enseignement classique propose des pistes pour s’adapter à ces écarts via le travail différencié, il n’en reste pas moins que les contenus du programme à acquérir dans un niveau de classe sont les mêmes pour tous, ce qui est totalement paradoxal.
Dolto écrit à ce sujet « il y a une telle différence entre un enfant de 2 ans et un enfant de 3 ans…une différence aussi grande que pré-pubère et jeune adulte ».
Suite à ce constat, on comprend qu’il serait préférable que les classes ne soient plus formées sur la base de l’année de naissance de l’enfant mais sur une tranche d’âge correspondant à une phase de développement. Ainsi l’enfant serait libre d’avancer à son rythme et selon ses besoins. De plus, une phase d’apprentissage est souvent précédée d’une phase de régression, il est donc nécessaire de laisser à l’enfant une souplesse plus grande.
Maria Montessori propose d’ailleurs dans sa pédagogie la mixité des classes d’âge et de niveaux. Dans les maisons des enfants ainsi que dans les classes élémentaires les enfants sont rassemblés selon trois groupes d’âge : les 3 à 6 ans, les 6 à 9 ans et les 9 à 12 ans. Cela permet de favoriser l’entraide des uns envers les autres. Françoise Dolto rapporte à ce sujet que les plus grands aiment se sentir utiles et que cela valorise beaucoup l’enfant de pouvoir en aider un autre. Elle affirme aussi que les explications d’un enfant à un autre sont souvent mieux comprises que les explications de l’enseignant.
Dans le système classique le travail proposé est la plupart du temps le même pour tous et il est imposé. En maternelle, on retrouve souvent des groupes de couleurs choisis par l’enseignant qui rassemblent des enfants qui durant toute l’année scolaire devront travailler à la même table pour faire le même travail dans le même atelier. Si du point de vue de l’organisation et du repérage pour l’enfant ce système semble plus simple à gérer, il pose problème quant à la liberté des enfants de pouvoir se diriger intuitivement vers les camarades qui sont à même de répondre à leurs besoins sociaux et aux apprentissages à un moment donné. Laisser la possibilité à l’enfant de tester de nouvelles amitiés et de nouveaux échanges dans le groupe classe ainsi que de pouvoir se comparer à d’autres groupes de travail apporte nécessairement un atout pour le développement de l’enfant. Il y a bien sûr les temps libres et de jeux où les enfants peuvent se retrouver mais ils sont plutôt rares et souvent cadrés.
En élémentaire, les élèves sont chacun devant leur table face au tableau sauf lorsqu’ils travaillent en groupe. Mais une fois encore, ces groupes sont la plupart du temps définis par l’enseignant. Quant au collège, les élèves y arrivent totalement formatés et empreints des règles et des valeurs inculquées par ce mode d’éducation classique.
Ce manque de liberté, nécessaire à l’exploration et à la construction de de l’identité de l’enfant est au coeur des travaux de Maria Montessori ainsi que de Célestin et Elise Freinet.
Maria Montessori dit à ce sujet « la liberté de l’enfant est au centre de notre travail, non pas cette liberté extérieure, mais bien la construction de la liberté intérieure. Elle se construit à travers un environnement qui favorise le mouvement qui a un but, l’activité autonome, le respect du rythme et des intérêts de l’enfant ».
La pédagogie élaborée par les époux Freinet est fondée sur l’expression libre des enfants (texte libre, dessin libre, correspondance inter-scolaire, imprimerie et journal étudiant…) sans oublier la coopération, élément important de cette méthode. Célestin Freinet est l’un des premier a avoir proposé un plan de travail, c’est-à-dire une méthode de travail personnel de l’élève d’après un plan fourni par le maître. Chez Freinet, les élèves élaborent avec le maître un plan général de travail pour la semaine, ainsi qu’un plan de travail individuel où l’élève inscrit les tâches qu’il veut accomplir. Le travail libre de l’élève est rendu possible par la production d’une bibliothèque de travail, par des fichiers scolaires coopératifs, par des visites, enquêtes… Il y a donc le plan général, les plans annuels et mensuels, qui sont collectifs, et des plans hebdomadaires et quotidiens, qui sont individuels.
On pourrait aussi parler longuement des classes surchargées et des enfants entassées dans des espaces beaucoup trop petits pour le nombre. Si cette contrainte était imposée à nous adultes, nous ne tiendrions pas une journée. Les « open space » tant à la mode dans le monde du travail ont largement prouvés leurs limites.
On s’intéresse beaucoup au bien-être animal et on s’insurge des élevages en batteries (ce qui est tout à fait honorable) mais quand allons nous cesser d’entasser les élèves ?
Tous ces points amènent un certain nombre d’élèves au décrochage ou à la phobie scolaire.
Socialisation : être ou paraître ? Telle est la question.
Il y a bien sûr d’autres facteurs qui entrent en ligne de compte dans le développement de l’enfant et dans le cadre scolaire. Comme nous l’avons vu plus haut, l’enfant n’arrive pas à l’école totalement vierge d’apprentissages. Les enfants qui ont transités par la crèche auront une expérience de socialisation plus grande que ceux qui ont été en nourrice ou qui sont restés avec leurs parents.
Le contexte familial et éducatif de l’enfant va également peser dans la balance. En fonction de la stimulation que l’enfant aura reçu (lecture d’histoires, communication, échanges, temps de jeux, valeurs…) celui-ci développera plus rapidement ou non certaines aptitudes.
Entre en jeu également, comme évoqué plus haut, le contexte social du pays et de la société dans laquelle grandit l’enfant.
Sur ce point, on peut faire les deux constats suivants :
1) L’État a défini comme modèle d’éducation scolaire celui que l’on retrouve dans les écoles publiques et qui sont les seules à être gratuites.
2) Les programmes élaborés dans ces écoles reflètent inévitablement la tendance politique de la société future.
Reprenons le premier point. Le contrôle de l’État sur le service d’instruction publique à l’avantage (dans l’absolu) de pouvoir garantir à chaque enfant le même bagage éducatif et un enseignement égalitaire pour tous. Mais cela signifie aussi que la place pour la diversité ou pour d’autres méthodes est quasi systématiquement écartée. Cela implique un certain conditionnement et oblige les parents dont les enfants ne peuvent être inclus dans le cadre classique à trouver leurs propres solutions et surtout de disposer d’assez de moyens financiers pour pouvoir avoir accès à une autre pédagogie.
Le deuxième point suit le premier. Dans les écoles publiques, les programmes changent à chaque nouveau gouvernement. Cela reflète une volonté de l’État d’influencer la pensée, les comportements, les valeurs des futurs adultes que deviendront les enfants.
Alors peut-on vraiment parler d’école de la bienveillance ? Un enfant peut-il vraiment devenir lui-même ? Est-ce que l’école et cette socialisation formatée permet de devenir et d’ÊTRE ou est-ce que le moule imposé nous oblige à PARAÎTRE ?
Il est indéniable que nous devenons une part de notre éducation. La répétition étant le moyen le plus sûr d’apprendre, il va de soi que les influences et les comportements de notre environnement vont formater le notre. Ce qui fait la différence c’est le travail sur soi… et cela implique de laisser dès le plus jeune âge un être humain se découvrir, agir, appréhender les conséquences, réfléchir et ensuite réajuster si besoin. Cela est possible, je l’ai constaté et vécu dans ma propre classe ou les dernières années j’avais totalement modifié ma façon de faire et d’introduire les choses. On ne peut prétendre donner un bagage pédagogique a un enfant sans se soucier de sa personne en premier lieu. On ne peut pas faire l’économie de cette connaissance de soi. Cela passe par un travail et des échanges sur les émotions éprouvées, par le fait de nommer ce que l’on ressent et d’accepter ses zones de vulnérabilité sans être étiqueté de « méchant », de « timide » ou « d’exceptionnel ». L’enfant à la naissance ne se soucie pas de savoir s’il est beau, s’il a le bon poids ou s’il dérange. Il est comme il est. Il ne se soucie pas non plus de ce que vont penser les autres : il exprime ses besoins clairement et immédiatement. Bien sûr, nous vivons tous ensemble et il y a des règles de socialisation à apprendre et à respecter pour le bien-être de tous. Mais je reste convaincue que si les enfants apprenaient à mieux identifier leurs besoins et leurs émotions, à les exprimer et à les respecter de nombreux problèmes pourraient être évités. L’école doit tendre à valoriser l’autonomie de l’enfant et non la dépendance. Elle doit accepter qu’il puisse y avoir des différences.
Communication et langage
Voilà pourquoi il est important à l’école de laisser la place au langage. Structurer sa pensée, mettre des mots clairs sur ses ressentis est vraiment utile. Cela peut passer par des exercices bien sûr, à travers des comptes et des histoires à restituer. Sur ce point, l’école maternelle publique laisse une assez grande place à ce domaine.
Jacques Salomé dit à ce sujet « Nous n’apprenons nulle part à communiquer, ni dans la famille et surtout pas à l’école. (…) Les parents et les pédagogues proposent plus souvent des censures que des invitations à une parole libre. (…) Si nous ne faisons pas l’effort de repérer quelques règles fondamentales d’une communication saine, nous risquons de continuer pendant toute notre vie à subir et à transmettre des conditionnements qui sabotent la communication (…) ».
Il propose trois principes de base :
1) Je reconnais et je confirme l’expression de l’autre comme la sienne, ses sentiments ou avis comme les siens.
2) Je m’exprime en parlant de moi, en me positionnant.
3) J’ai le désir de mettre en commun ton point de vue et le mien, non en les opposant ou en les confondant, mais en les apposant, l’un près de l’autre, en les confrontant. De là peuvent naître un partage, un échange.
Ces principes apprennent à ne pas laisser les autres parler sur nous et à les inviter plutôt à parler d’eux-même. Cela permet à chacun de différencier ce qui vient de nous et ce qui vient des autres. Cela ouvre aussi l’espace à la différence et au respect des opinions. S’entendre avec quelqu’un ne signifie pas nécessairement avoir les même avis, les mêmes sentiments ou les mêmes points de vue.
Ecole et handicap
Il y aurait tant à dire sur ce sujet aussi… On peut faire le constat que l’école a évolué concernant le handicap et la place de ces enfants dans la société. Elle prône aujourd’hui une inclusion pour tous, ce qui a le mérite de les considérer au même titre que les autres et c’est vraiment très important. Nous avons tellement à apprendre des enfants porteurs de « différences »… Il existe également des classes spécialisées qui souffrent malheureusement du manque de moyens pour être développées… Des aides et des aménagements ainsi que des parcours d’études spécialisés sont proposés. Il faut continuer à développer cela et surtout à fournir les moyens nécessaires, ce qui manque cruellement aujourd’hui.
Claudia Maréchal
© Tous droits réservés
Bibliographie :
Sigmund FREUD, Considérations actuelles sur la guerre et sur la mort, 1915
Déclaration des droits de l’enfant, 20 novembre 1959
Emile DURKHEIM, L’éducation, sa nature et son rôle, Ed Félix Alcan, 1926
Françoise DOLTO, La cause des enfants, Ed Robert Laffont, 1985
Françoise DOLTO, Les étapes majeures de l’enfance, Ed Gallimard, 2014
Maria MONTESSORI, Les étapes de l’éducation, Ed Desclée de Brouwer, 1936
Jacques SALOMÉ et Sylvie GALLAND, Si je m’écoutais… je m’entendrais, Ed j’ai lu, 2003
Célestin FREINET Les techniques Freinet de l’École moderne (1964), Paris, Librairie Armand Colin, collection Bourrelier
Jean PIAGET Psychologie et pédagogie, Gonthiers Denoël, 1969, coll. Médiations, Paris
Jean PIAGET et Bärbel INHELDER, psychologie de l’enfant, Quadrige, PUF, 2004,